mercredi 14 mai 2008

Faut-il interdire à Bouteflika de rencontrer les chefs d'Etats étrangers?

C'est à peine croyable mais la chose est tout à fait vraisemblable: on vient d'apprendre qu' en novembre dernier, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, s'est fait complaisant, comme jamais on aurait pu l'imaginer, devant Nicolas Sarkozy alors en visite à Alger. Certes, les Algériens savent que leur président, contrairement à Zeroual qui ne s'aplatissait pas devant Chirac, est prêt à composer, à lacher du lest et à donner sans compter pour s'assurer du soutien des puissances étrangères, surtout depuis qu'il rêve d'un troisième mandat. Mais le propos qu'il a tenu à l'adresse du chef de l'Etat français laisse pour le moins perplexe. Lorsque Sarkozy lui fit part de son projet dit Union pour la méditerranée, Bouteflika lui aurait répondu: "je suis votre soldat." Ces mots, censés demeurer secrets à jamais, ont été éventés par Michel Rocard, ancien Premier ministre français, actuellement membre du Parlement européen, après une entrevue avec Sarkozy au palais de l'Elysée. A ceux qui vont en douter, il faut peut-être rappeler que le président français s'était déjà exprimé publiquement sur l'accueil que le chef de l'Etat algérien avait réservé à sa proposition. "Je crois que le président Bouteflika est devenu un ardent ambassadeur de l'Union méditerranéenne", avait-il déclaré. A ceux qui vont continuer de douter, on peut encore rappeler que ces mots font partie du vocabulaire habituel de Bouteflika. Voici une anecdote rapportée en off par Chadli Bendjedid à un journaliste algérien: à l'issue d'une réunion du Comité central du FLN en 1979, sachant que ses jours dans les rouages du pouvoir étaient comptés, Bouteflika courut voir Chadli et, accompagnant son propos d'un salut militaire réglementaire, lui dit:"je suis avec vous, M. le président. Considérez-moi comme votre caporal, nous sommes tous vos caporaux."
Caporal face à Chadli et soldat face à Sarkozy, voilà qui ne plairait pas à Chadli, mais passons. De toutes façons, Bouteflika est désormais revenu de son "autocaporalisation" puisque, 20 ans plus tard, il qualifiera Chadli ainsi que tous les anciens chefs de d'Etat algériens de "présidents stagiaires."
Cette complaisance de Boutef face à Sarko n'empêchera pas Belkhadem, Zerhouni et Boukerzaza ni certains journalistes émargeant chez un clan quelque part à Ben Aknoun, de s'effaroucher, en mars 2008, soit quatre mois plus tard, de ce que des partis politiques ait eu des échanges avec certaines représentations diplomatiques accréditées à Alger. Quand le président de la République se déclare "soldat" d'une puissance étrangère, peut-on encore parler de souveraineté? Après cela, quelle souveraineté serait en péril du fait d'échanges entre des partis de l'opposition et des ambassadeurs étrangers?
Ne faut-il pas commencer par interdire à Bouteflika tout contact avec les chefs d'Etat étrangers?
Il est vrai que la Constitution dispose que la politique extérieure du pays est du ressort de président de la République, mais la question mérite d'être sérieusement étudiée d'autant que la preuve est faite que les intérêts de l'Algérie passent souvent pour "secondaires" devant les ambitions personnelles de notre chef de l'Etat. On sait, par exemple, que des marchés ont été octroyés à des entreprises françaises telles que Alsthom alors que leurs offres étaient nettement moins avantageuses que celles d'autres opérateurs.
Said Chekri

Aucun commentaire: