lundi 12 mai 2008

Tabou et Mugabe, même combat?

La presse nationale ne semble pas s'y intéresser particulièrement mais le débat, pourtant, vaut le détour: la surveillance internationale des élections serait-elle la solution pour empêcher la fraude de l'emporter encore une fois en 2009?
A cette interrogation, Karim tabou, le premier secrétaire du FFS, vient de répondre sans ambage. Pour lui, "l'exigence d'une surveillance internationale des élections est une façon déguisée de cautionner le système et de crédibiliser sa parodie électorale." Ainsi exprimée, la position du parti de Hocine Ait-Ahmed ne devrait surprendre personne. Elle tient de ce désir constant et immuable chez la direction de ce parti de s'opposer systématiquement aux propositions et initiatives émanant du RCD. En effet, M. Tabou ne s'encombre pas d'arguments pour rejeter l'idée d'une surveillance internationale des élections en Algérie. Aucune critique du mécanisme lui-même, aucun exemple de pays où un tel mécanisme se serait révélé vain, rien de tout cela. Ainsi, au lieu de débattre sereinement de la question ou de proposer éventuellement un autre "remède" contre la fraude, il se saisit simplement de la question pour construire une accusation de manière prompte, directe et expéditive: ceux qui appellent à une surveillance internationale des élections ne font que "flouer le peuple(...)", pour "cautionner le système et sa parodie électorale (...)" Il est vrai que Karim Tabou a conclu sa déclaration par une préconisation. "Il faut plutôt lever l'état d'urgence", conseille-t-il sans expliquer à son auditoire en quoi une telle mesure serait en contardiction avec une surveillance internationale des élections.
En dehors de la "position" du FFS ainsi formulée, aucune réaction partisane à la démarche du RCD n'est rendue publique à ce jour. La plupart attendent sans doute d'y voir plus clair avant de se prononcer. L'éventualité d'une révision de la Constitution, toujours d'actualité même si Bouteflika donne quelquefois l'impression de ne pas vraiment y tenir, est de nature à mettre nombre d'acteurs politiques dans l'ambarras pour certains, dans l'expectative pour d'autres. L'accueil que la classe politique réservera à la revendication du RCD sera en effet, dans une large mesure, fonction du sort final que connaîtra le souhait de Bouteflika de briguer un troisième mandat, donc de la révision ou non de la Constitution. C'est d'ailleurs l'un des mérites incontestables de cette initiative du RCD: elle se veut valide et applicable quels que soient les futurs candidats à l'élection présidentielle, c'est-à-dire avec ou sans Bouteflika dans la course.
Said Sadi poursuit donc en solo sa campagne en faveur d'une surveillance internationale des élections, convaincu que ce procédé qui a permis à d'autres pays d'en finir avec la fraude électorale et de se doter de pouvoirs politiques légitimes après des décennies de dictature doit être mis en oeuvre en Algérie.
A l'heure où le président du RCD sillonne les capitales européennes pour expliquer sa démarche, après en avoir fait de même en Amérique du nord, et quasiment en même temps que Karim Tabou l'accuse de vouloir "flouer le peuple", le président et néanmoins dictateur Robert Mugabe annonce son refus d'une surveillance internationale du second tour de la présidentielle au Zimbabwe, au risque de plonger le pays dans une spirale de violence comme celle vécue, début 2008, au Kenya. C'est sans doute qu'il ne veut sans doute pas "flouer le peuple", lui qui n'a autorisé la commission électorale de son pays à rendre publics les résultats du 1er tour que plus d'un mois après le vote, imposant ainsi à l'opposition un second tour frauduleux, alors qu'elle l'avait largement emporté dès la 1ère manche. Alors, Tabou et Mugabe, même combat? Voilà qui va sans doute encourager le pouvoir algérien à se joindre à eux. Car, comme Mugabe et comme Tabou, le pouvoir ne veut pas "flouer le peuple".
Said Chekri

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